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Panem et circences

Panem et circences. Avis aux lecteurs – Ne soyez pas découragés par l’emploi prématuré du latin, l’article est écrit en langue vernaculaire ! Après vous avoir présenté notre fine sélection de jeux divers et variés, EMH vous propose de clôturer la thématique, et revenir sur ses en(jeux).


Si sa version latine vous est inconnue, il suffit cependant de traduire l’expression en français pour reconnaître la célèbre formule « du pain et des jeux [du cirque] ». Le mot est celui de Juvénal, auteur romain des Satyres, vers 100-125, dont l’œuvre est longtemps restée méconnue avant de faire l’objet d’un vif intérêt. Au livre X, on y lit : « Le peuple qui faisait autrefois les empereurs, les consuls, les tribuns, enfin dont toutes les choses dépendaient, est trop heureux aujourd’hui d’avoir du pain, et il ne désire tout au plus que des spectacles ».


Le pain d’un côté, les jeux de l’autre, le rapprochement est hasardeux. Comment expliquer que le jeu, activité libre et ludique, ait sur nous pareille emprise ? Si chaque joueur se prête au jeu en pleine conscience, les ficelles sont bien trop grosses pour faire autrement, il feint de ne pas jouer. L’illusion est volontaire, tant pour le joueur que pour le spectateur. Rappelez-vous de votre dernière partie endiablée d’échecs ou de cartes. Valet, dame et roi ne signifient rien dans l’absolu et pourtant, au sein des 52 cartes qui composent le paquet, les voilà investis de sens et de pouvoirs spécifiques. L’emprise du jeu sur nous est irrationnelle mais bien réelle.


Notre attachement au jeu ne date pas d’hier. Le jeu d’Ur, retrouvé sur un site archéologique irakien datant de 2600 avant notre ère, est l’un des plus anciens jeux au monde dont nous avons connaissance aujourd’hui. Dès l’enfance, on s’abandonne volontiers à une construction fictive fondée sur des règles arbitraires dans l’espoir incertain de s’accomplir dans la victoire. Les plus philosophes y verront sans doute une métaphore de l’existence humaine, nous vous laissons en juger. Une certitude demeure : contrairement à ce que Juvénal laisse entendre par sa citation, le jeu est, en lui-même, éminemment politique. Pour l’emporter, tout est permis : entraide, ruse et même triche sont de mise ! Si vous en doutez, il suffit d’admirer l’œuvre de Georges de La Tour, Le Tricheur à l’as de carreau.



Jeu royal d'Ur provenant d'Irak ©British Museum

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